En 2022, une étude menée par l’American Psychological Association a révélé que 37 % des personnes ayant vécu un événement traumatique ont constaté une amélioration durable de leur bien-être après avoir voyagé seules, sans encadrement thérapeutique traditionnel. Cette tendance, autrefois marginale, gagne du terrain auprès de ceux que les approches classiques laissent insatisfaits.
Des chercheurs observent que l’isolement géographique, combiné à l’autonomie quotidienne, favorise des mécanismes de résilience difficiles à déclencher en milieu familier. Les professionnels de santé mentale commencent à intégrer cette solution dans leurs recommandations, malgré l’absence de consensus sur ses modalités précises.
Quand le traumatisme bouleverse tout : comprendre l’impact sur le quotidien
Dès qu’il s’invite, le traumatisme grignote chaque centimètre de la vie : gestes anodins, routines, sommeil, relations. Rien n’échappe vraiment à son emprise. Que l’on vive à Paris, à Marseille ou dans un village, l’environnement familier prend soudain une couleur terne, presque étrangère. Corps et esprit se figent, la peur s’incruste, parfois jusqu’à l’agoraphobie pure et simple. Les histoires abondent. Lisa, accablée par la perte de sa mère, s’est retrouvée incapable d’éprouver la moindre émotion. Angela, après une rupture difficile avec Cédric, errait sans but entre son appartement et son lieu de travail, incapable de retrouver du sens.
Pour certaines personnes, voyager seul jaillit comme une impulsion de survie face à la blessure émotionnelle. Ce départ n’a rien d’une fuite, c’est une tentative farouche de reprendre le contrôle sur une existence qui échappe. Seb, des Globe Blogueurs, a décidé de tout quitter pour s’extirper d’une routine alourdie par une blessure à la hanche. Annie, autrice du blog Annie Anywhere, a osé le voyage solo pour apprivoiser une agoraphobie devenue envahissante. Ici, pas de parcours préfabriqué : chaque personne trace sa voie, parfois dans l’urgence, souvent dans le doute, pour renouer avec son corps et son esprit.
Changer de décor agit aussi sur la santé mentale. Briser l’automatisme des lieux, renoncer aux habitudes, provoquer la rencontre de l’inconnu : c’est ainsi que l’on réveille, peu à peu, l’élan vital. Ce mouvement traverse toute la France, des centres-villes aux coins les plus reculés. Rupture, deuil, choc de la différence culturelle : autant de motifs qui poussent à s’aventurer, seul, hors d’un quotidien devenu trop étroit.
Voici ce qui motive souvent ce choix singulier :
- Le voyage découle parfois d’une rupture, d’un deuil ou d’un traumatisme.
- Partir en solo sert à se reconstruire, à renouer avec la confiance en soi.
Pourquoi voyager seul peut transformer la manière de se reconstruire
Le voyage en solitaire marque une coupure nette avec le paysage habituel. Hors du regard des proches, loin des routines, chacun se retrouve face à soi-même, sans filtre. Ce n’est pas une simple parenthèse : changer de pays, traverser le Canada, s’immerger dans une culture inconnue, tout cela devient une succession d’expériences où le corps et l’esprit se mettent à l’épreuve.
Là-bas, la liberté retrouvée s’accompagne d’une vraie introspection. Dans le silence d’une chambre inconnue, à l’aube dans un bus désert, lors d’une première conversation hésitante dans une autre langue, chaque petit défi nourrit la confiance en soi. Les cadres anciens s’effondrent, laissant place à une sensation de renaissance. Voyager n’est jamais une fuite passive. C’est un acte de création, une manière d’imaginer sa propre suite après la tempête.
On peut retenir plusieurs mécanismes à l’œuvre :
- Le développement personnel s’opère au fil de l’expérience, loin des modèles dictés par l’entourage.
- Le dépassement de soi n’a rien à voir avec l’audace pure, il s’impose parfois parce qu’aucune autre issue ne semble possible.
Aucun miracle dans la guérison, seulement une succession d’actions concrètes : réserver un billet, affronter une peur, demander de l’aide, accepter de se perdre, puis apprendre à se retrouver. Voyager seul, c’est s’ouvrir à l’inattendu et goûter, enfin, à une respiration différente.
Quels bénéfices psychologiques attendre d’un voyage en solo face à la dépression ?
Partir seul, c’est s’accorder un espace propice à l’introspection, loin des habitudes et du regard constant d’autrui. Pour la psychologue Élisabeth de Madre, prendre la route après une rupture ou un choc contribue à renforcer l’estime de soi. Quitter un quotidien abîmé par le traumatisme, c’est affirmer une résistance face à la dépression. Le voyage en solo réveille l’envie de mouvement, pour l’esprit comme pour le corps.
Ce changement ne se limite pas à la découverte de nouveaux horizons. Être confronté à l’inconnu modifie la façon d’appréhender l’anxiété, d’apprivoiser la peur ou la solitude. Pour Annie, qui a dompté son agoraphobie en chemin, le voyage s’est révélé un véritable terrain d’expérimentation. D’autres s’appuient sur l’écriture thérapeutique : carnets, blogs, messages adressés à soi-même. Plus qu’un simple exutoire, cette pratique permet d’organiser sa pensée, de soutenir sa santé mentale.
Retenons quelques bénéfices majeurs de ce type de démarche :
- Le voyage thérapeutique aide à révéler des ressources jusque-là insoupçonnées.
- S’éloigner des repères ordinaires encourage à revoir ses propres limites.
- Partager son expérience sur des plateformes ou auprès de groupes offre un sentiment de lien aux autres.
Certains professionnels orientent vers ce genre d’expérience pour rompre avec l’état dépressif et enclencher un mouvement de reconstruction. Le voyage en solo ne se résume pas à une fuite : il devient une façon de renouer avec soi, d’affirmer son droit à l’autonomie et à la dignité.
Conseils concrets et ressources pour oser partir même quand on ne va pas bien
Se lancer dans un voyage solo demande un véritable effort pour sortir de l’isolement. Un bon point de départ consiste à intégrer une communauté. Par exemple, la page « Voyager au féminin » animée par Jenny Diab sur les réseaux rassemble de nombreux témoignages, inquiétudes, astuces. Les articles de JDroadtrip.tv dédramatisent les peurs, la tristesse, et les éventuelles rechutes. Lire, s’informer, poser des questions : tout cela fait partie de la préparation.
Il est aussi nécessaire d’adapter la destination à son état du moment. Certains choisissent les montagnes du Jura, d’autres préfèrent la Côte d’Azur, Séville ou la quiétude de Santorin. D’autres encore racontent leur séjour en Thaïlande ou en Australie, appréciant la douceur du climat, la facilité d’accueil, le rythme apaisant. L’important n’est pas la distance, mais le sentiment de pouvoir respirer à nouveau.
Prendre l’habitude de l’écriture aide à garder le cap : carnet de bord, blog, notes rapides sur téléphone. Ce dialogue intérieur aide à baliser le retour à soi et à marquer chaque étape. Si la peur s’invite, il reste possible de consulter un professionnel à distance ou d’échanger avec des pairs sur des forums. Les groupes de parole, qu’ils soient en ligne ou sur place, allègent la sensation d’abandon.
Avant de partir, il peut être utile de garder en tête quelques pistes :
- Intégrer un groupe ou une communauté, même virtuelle, pour rompre l’isolement.
- Privilégier des lieux où la logistique ne devient pas une source de stress.
- Écrire régulièrement, partager ses avancées, demander conseil quand le besoin se fait sentir.
- Accepter que le chemin soit ponctué de doutes, et que cela fasse partie du processus.
Voyager seul ne signifie pas couper tout contact. Même un échange bref, un sourire sur la route, peut tout changer.
Partir en solo, c’est choisir l’inconnu pour mieux s’appartenir. Loin du confort figé, chaque pas ouvre la possibilité d’un nouveau départ. Que reste-t-il à inventer, sinon sa propre façon de se reconstruire ?


